Association Histoire et mémoire ouvrière en Seine-Saint-Denis

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>>Esquisse d’une problématique d’ensemble

par Jacques Girault
Extrait d’un numéro spécial sur le thème de "L’entrée en politique des femmes en banlieue nord" de Mémoires d’usines, Mémoires ouvrières paru en 2002, p. 7-9.
Le Général de Gaulle, s’adressant à la Nation , le 12 septembre 1944 au Palais de Chaillot, confirme que les femmes auront le droit de vote, comme l’ont décidé l’Assemblée consultative provisoire et l’ordonnance d’Alger du 21 avril 1944 sur l’organisation des pouvoirs publics (...)
Dans le passé, les femmes n’ont pas été indifférentes à la politique sans avoir les possibilités légales d’intervenir. Aspect d’une longue lutte pour légalité civique, le droit de vote, qu’il soit ou non revendiqué, modifie les données socio-politiques de la France.
La banlieue Nord, selon notre définition, comprend les anciens arrondissements de Saint-Denis pour la Seine et de Pontoise pour la Seine-et-Oise. Dans cet espace, fortement marqué par la salariat et par la condition ouvrière où les femmes ne sont pas absentes , les femmes comme ailleurs ont dû s’inscrire dans les cadres de la vie politique générale qui les privent de la citoyenneté. Comme ailleurs elles ont déjà participé à certains aspects de l’activité politique et sociale avant 1939, notamment lors des actions contre la vie chère,pour de meilleures conditions de logements, aussi bien dans les lotissements que dans les centres, dans les mouvements sociaux du milieu des années 1930, dans la solidarité avec les Républicains espagnols. Engagées dans la production, elles peuvent aussi se syndiquer.
Dans la bonne implantation du parti communiste, elles occupent une petite place et de nombreuses militantes de l’après-guerre font leurs premières armes dans les années 1930. (...)
Pendant la guerre, l’obligation légale, depuis novembre 1940, faite aux conseils municipaux de comprendre une femme pour s’occuper des questions sociales, entre en application en 1941-1942. Mais il s’agit de nominations par la préfecture et non d’une élection. La participation féminine aux luttes de la Résistance, qui connaissent une intensification dans l’hiver 1943, donne un sens inédit aux engagements des femmes qui revendiquent au moins des conditions de vie meilleures ou le retour des hommes éloignés pour diverses raisons. Mais surtout, là comme ailleurs, elles occupent une place décisive dans les dispositifs résistants. Ces expériences sur le terrain ne peuvent être effacées d’autant qu’elles s’inscrivent dans un courant victorieux. (...)
Des travaux effectués à l’université Paris 13 ont ouvert la voie à des recherches plus coordonnées sur l’entrée des femmes en politique, premières recherches engagées par des étudiants de licence d’Histoire. Celles-ci s’ajoutent aux travaux sur les électrices, les institutrices, les ouvrières, les étrangères, la participation des femmes à la vie municipale. (...)
Ces recherches reposent sur des sources variées : recensements, listes électorales, registres de délibérations des conseils municipaux, rapports de police, témoignages, presse. il nous a fallu trier parmi ces mémoires de diverses natures, sources d’un lieu d’archives pour les étudiants de licence, sources plus élargies naturellement à partir de la maîtrise. La coordination et la direction de ces recherches ont tenu compte des différents apports, alliant le local et le national. Nous n’avions pas de modèle.
Des réponses portent sur la composition socioprofessionnelle de ce nouvel électorat féminin, sur la présence féminine dans les élections, sur l’activité des femmes dans les conseils municipaux qui renouvelle la pratique politique des femmes et aussi des hommes. S’ajoutent le rôle des mouvements féminins, le traitement différencié des femmes par les partis selon les communes, l’émergence de revendications féministes, l’impact des grandes luttes pour l’amélioration de la condition féminine. Nous savons que, sur le plan national, les mouvements issus de la Résistance dans lesquels les femmes militent, sont divers. Qu’en est-il sur le terrain local ?
Nous retrouvons des clivages en banlieue Nord, où pour des raisons qui tiennent à l’histoire, les femmes communistes abondent. Mais ici ou là, et plus souvent en Seine-et-Oise, d’autres femmes s’engagent. Le mouvement de repli, enregistré par la suite sur le plan national, ne se produit pas de façon uniforme en banlieue.

AHMO 2008-2010